mercredi 4 juin 2014

4000 faits, 5000 en point de mire !

Nuit du 3 au 4 juin, camp 42
Distance du jour : 151 km
Distance totale : 4013 km
Position : N68.443 W36.244, alt 2845 m
Temps de progression : 7 heures

Nous nous en doutions un peu... Le team belgo-canadien (Dixie & Eric), passé dans les parages il y a peu, avait ici affiché un score. Pour cela, il fallait du bon vent, mais également une surface "propre" : on ne fait pas 300 km en moins de 14 heures, sinon sur un "billard" !

Mais en ce début d'étape, de billard il n'est toujours pas question : nous poursuivons notre descente au sein d'une vaste dépression, le bassin d'alimentation du glacier Kangerlussuaq, un des grands corridors naturels de la façade orientale de l'inlandsis qui canalisent les vents catabatiques vers la côte. Nous perdons de l'altitude par paliers. Chaque ressaut s'accompagne d'une légère accélération du vent, nous contraignant à skier comme de "vieilles dames", les pieds passablement écartés, pour pouvoir rattraper toute faute de carres dans cette allure rapide où il faut skier skis a plat dans les sastrugies.
Lumières irreelles. A minuit, le soleil, dans notre dos ou presque, s'approche de l'horizon. Des nappes de brouillard se forment ça et là. A l'est, apparaissent de nouveau les silhouettes blanches de sommets lointains, dans le massif du Prince de Galles...
Soudainement, au point où s'achève notre descente, les sastrugies laissent place à une surface de plus en plus unie. A tel point qu'une vingtaine de kilomètres plus loin, nous laissons de francs sillons sur un tapis de poudreuse veloutée, qui semble s'être posée ici à l'abris des vents de l'inlandsis... Nous n'en croyons pas nos yeux : si nous commencions à sérieusement en douter, une telle surface de neige existe bel et bien au Groenland ! Pour parfaire le tableau, une double parhélie particulierement marquée se dessine autour du soleil. Grande voile bien calée, nous filons rapidement sur notre cap dans une allure au grand largue.
Beauté des lieux et des lumières, satisfaction de la trajectoire tendue vers l'objectif.. Seul bémol à l'histoire, le froid particulièrement marqué qui nous dévore les doigts et nous oblige à nous recroqueviller sous des tonnes de capuches...

Au kilomètre 100, à 3 ou 4 heures du matin, le vent s'est encore renforcé ; nous basculons "en 10", persuadés que nous ne sommes encore qu'au début d'une longue étape et que nous avons là un bon coup à jouer... Mais 20 kilomètres plus loin, nous gréons à nouveau nos plus grosses toiles, et 20 kilomètres plus tard, le vent tombe définitivement alors que nous atteignons, à 2845 metres d'altitude, un très vaste col, sorte de selle reliant le point culminant de l'inlandsis au massif du Schweizerland, situé dans notre sud-est. Arrêt anticipé des festivités, le "casse du siecle" n'aura pas lieu !

Nous sommes ici en Terre du Roi Christian IX, à l'ouest des Montagne du Dauphin Frederik, au nord-nord-ouest du massif du Schweizerland et de son point culminant, le Mont Forel.
Nous sommes passés sous la latitude de la ville de Tromso, dans le nord de la Norvège.

NB :
Nous dédions ces 4000 km à Aurelie, amie commune à Cornelius et moi, qui fut à l'origine de notre rencontre et à qui nous devons nos plus belles épopées polaires :-)

Enfin, nous souhaitons féliciter chaleureusement nos "compagnons d'inlandsis" Dixie Dansercoer et Eric MacNair-Landry qui viennent d'achever leur circumnavigation après avoir parcourus 4045 km en 55 jours.
A cette heure, deux équipes continuent de progresser sur les glaces de la calotte : celle de Ramon Larramendi, avec 2098 km au compteur ; et la nôtre, avec maintenant le chiffre de 5000 km en point de mire !

1 commentaire:

  1. Parhélie, soleil de minuit... j'imagine très bien bien l'ambiance :) Bravo pour les 4 000 km !

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